La Fed confirme la restriction monétaire et l’Italie s’oriente vers un budget laxiste.
Après un début de semaine sans grand relief, les Bourses européennes ont terminé en baisse vendredi, en raison de l’annonce d’un budget italien plus déficitaire que prévu. Les valeurs bancaires se sont trouvées attaquées car le système bancaire européen peut être la principale victime du laxisme italien. Le gouvernement transalpin a ainsi décidé de revoir à la hausse le déficit budgétaire de 2019, ce qui va à l’encontre des précédents engagements vis-à-vis de la BCE et de Bruxelles. La coalition populiste au pouvoir en Italie vient en effet de présenter un budget prévoyant un déficit public de 2,4% pour les trois prochaines années, soit au-delà des souhaits de la Commission européenne. Cette dernière va se retrouver devant un très fort dilemme. Elle peut essayer de faire respecter les règles et provoquer ainsi une crise politique avec un gouvernement hostile par principe aux règles communautaires. La proximité des élections européennes va peser lourd aussi dans les décisions de la Commission. Elle ne peut donner un satisfecit à ce projet de budget mais elle doit néanmoins prendre en compte le choix politique d’un gouvernement élu démocratiquement. Pierre Moscovici, le commissaire européen a ainsi rappelé que la « Commission n’avait pas intérêt à une crise avec l’Italie, mais l’Italie doit réduire sa dette publique qui reste explosive. » En théorie, la Commission doit signifier à Rome que son budget ne respecte pas les règles, d’autant qu’elle s’était engagée à réduire son déficit de 1,6 % du PIB en 2018 à 0,8 % en 2019. La dette publique italienne atteint plus de 130 % du PIB en 2018, bien au-delà des seuils tolérés. L’Europe devrait donc suivre une procédure rigide mais comportant une certaine marge d’appréciation politique. Les discussions peuvent s’engager jusqu’à fin novembre, moment où la Commission se prononcera définitivement en qualifiant les budgets de « conformes » ou demandant des modifications.
Les marchés ont donc fortement sanctionné le secteur bancaire européen. La crainte des investisseurs sur les banques est due au fait que les banques européennes sont fortement détentrices de la dette publique italienne. Ainsi, ce vendredi toutes les banques ont reculé entre -7 et -9% pour les banques italiennes et entre -2 et -4% pour la plupart des autres banques.
En raison de ce facteur particulier, la semaine a été marquée par des variations assez disparates des différents marchés en fonction du poids des banques dans les indices : -0,92% pour l’Eurostoxx50, – 0,01% pour le CAC 40 et -1,48% pour le DAX. Le Dow Jones affiche également une baisse de -1,07% et le Nasdaq parvient à gagner +0,74%, en raison de la poursuite des performances des valeurs technologiques. Enfin, le Nikkei continue sa progression et gagne encore cette semaine +1,05%. A 24245,76 points ce matin, il est au plus haut des années 2000.
Fort risque d’enlisement « Brexit » pour la Grande-Bretagne
Ce dimanche s’est ouvert le congrès du parti conservateur britannique à très hautes risques pour Theresa May. Cette dernière n’a jamais été aussi isolée dans l’UE comme dans son pays. Trois stratégies existent au sein des conservateurs. Le ministre des finances, Philip Hammon pousse à un maintien dans l’union douanière européenne, voire à une association avec l’UE comparable à celle de la Norvège au sein de l’Espace économique européen. Cette issue réglerait la question de la frontière irlandaise mais elle contredit les demandes de Mme May. Cela impliquerait le maintien de la libre circulation des personnes et interdirait à Londres de signer des contrats de libre-échange avec les autres pays, ce qui est en opposition avec ce que veulent les partisans du Brexit. D’autres membres du gouvernement défendent une vision encore plus libérale : la signature d’un simple accord de libre-échange du type du CETA, ce qui va impliquer des années de négociations sans résoudre la question irlandaise. Enfin, Boris Johnson, ancien ministre des affaires étrangères, détient peut-être la clef du congrès conservateur. Il souhaite prendre la place de Theresa May et s’oppose violemment au plan proposé par l’actuel chef de gouvernement. Selon un sondage, 35% des adhérents estiment que Mme May doit démissionner immédiatement, 45% avant les prochaines élections et seulement 19% qu’elle ne doit pas partir. L’éventuel accord sur le modèle du CETA est souhaitée par 45% des suffrages, contre seulement 8% pour un rapprochement avec l’UE de type norvégien. 37% des membres préféreraient que Mme May quitte totalement l’UE et que le pays reprenne sa liberté au prix du retour des droits de douane. On pourrait alors s’acheminer vers une forme de « non deal » qui serait dommageable à l’économie britannique et aussi à l’Europe. En conclusion, trois solutions politiques sont envisageables : de nouvelles législatives, une prolongation des négociations avec l’UE ou un second référendum.
Confirmation de la fin de la politique accommodante de la FED.
Comme attendu, la Fed a relevé sa fourchette de taux directeurs ce mercredi. Depuis le début de la hausse initié fin 2015, la progression cumulée est de 2%. Hors inflation, le taux de la Fed devient positif pour la première fois depuis 2008. La politique accommodante est donc terminée. La Fed a aussi augmenté sa perspective de croissance pour 2018 mais n’a pas modifié ses prévisions pour 2019 et 2020. La tendance prévue par la Fed est la suivante : une décélération de la croissance du PIB de l’ordre de 3,1% actuellement à 2%, un taux de chômage autour de 3,5% et une inflation de 2%. Nous devrions donc assister à la poursuite de la remontée des taux, la prochaine en décembre 2018, puis trois nouvelles hausses en 2019 et une autre en 2020, soit une hausse prévue des taux de +1,25%. Durant sa conférence de presse, Jerome Powell a néanmoins fourni des éléments supplémentaires concernant sa stratégie, en confirmant qu’il serait réactif par rapport aux évolutions des agrégats économiques. Ainsi, si l’inflation accélère, la hausse des taux sera plus forte et si l’économie montre des signes de faiblesse, alors on pourrait revenir à une baisse.
La plupart des chiffres économiques publiés vont dans le sens de ce resserrement aux Etats-Unis. En septembre, la confiance des ménages et des industriels a encore augmenté, atteignant un niveau qui n’a plus été atteint depuis les années 1999/2000 (100,1 pour la confiance des consommateurs à fin septembre). D’autres signaux vont également dans le sens d’une diminution du chômage. Toutefois, beaucoup d’industriels jugent que la politique commerciale de l’administration US aura un impact négatif sur les plans d’investissement dans les prochains mois.
Finalement, la Fed vient d’atteindre un de ses objectifs, celui de retrouver une marge de manœuvre, ce qui n’est toujours pas le cas de la BCE.
Nouvelle hausse possible mais sous conditions…
Quelques chiffres importants sont attendus. Les indices ISM manufacturier et non-manufacturier en début de semaine devraient marquer un léger repli, mais toujours à des niveaux élevés. Le rapport sur l’emploi de septembre devrait aussi confirmer le bon état de l’économie US. Les créations nettes d’emploi ont été de 185.000 par mois cet été et sont attendues quasi stables. Le taux de chômage est aussi estimé à 3.8%, un retour sur son point bas de ce cycle. Nous pourrions alors à court terme retrouver des facteurs de marché haussiers aux Etats-Unis. En Europe, les deux points faibles restent l’Italie et la Grande-Bretagne. Dans ces deux cas les facteurs de risques sont nombreux. Ce lundi, la coalition gouvernementale allemande doit mettre fin aux discussions internes avec le lobby automobile en annonçant une décision sur la mise aux normes par les constructeurs des véhicules diesel en circulation mais trop polluants.
En conclusion, les marchés financiers pourront rebondir en Europe à condition que les tensions diminuent entre l’Europe et l’Italie et que les tenants d’un « hard brexit » ne sortent pas vainqueurs du congrès des Torries. Challenge pas vraiment gagné !
Source : Lettre hebdomadaire n°43, lundi 1er Octobre 2018 Jean-Noël VIEILLE – Chief Economist HPC membre du Groupe OTCex
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